CUNICULTURE
Magazine Volume 31 (année 2004) pages 49 à 51

Pasteurelloses du lapin

P. Coudert

BASE, Unité de Pathologie du Lapin,
INRA Centre de Tours, 37380 Nouzilly, France
Coudert@tours.inra.fr

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Le Dr Pierre Coudert est un spécialiste de la pathologie du Lapin, et des pasteurelloses en particulier. Le bref article ci-dessous est le résumé d'une conférence prononcée par l'auteur fin 2003 lors d'un colloque international européen. Nous invitons ceux qui voudraient en savoir plus sur le sujet à consulter le texte d'un article rédigé par l'auteur avec 2 autres collègues en 1999 et publié dans la Revue de Médecine Vétérinaire. Ce texte est disponible en ligne sur site du centre INRA de Tours à l'adresse suivante : http://www.tours.inra.fr/urbase/internet/resultats/articles/pasteurellose.htm
 
   
 
La pasteurellose : une maladie fréquente 

La pasteurellose est l'une des maladies bactériennes les plus fréquentes et graves chez le lapin aussi bien en élevage qu'en animalerie de laboratoire. Elle est caractérisée surtout par une atteinte de l'arbre respiratoire et par des affections purulentes d'autres organes dont la peau, voire par des entérites ou une septicémie. Cette pathogénie multiple a donné lieux à de nombreuses études dès la fin du XIXème siècle. Quasiment tous les lapins sont porteurs de Pasteurella multocida l'agent unique responsable de cette pathologie multiforme.

 

Beaucoup de porteurs sains et une contamination surtout par contact

L'épidémiologie de la pasteurellose varie avec le type d'élevage (fermier, laboratoire, professionnel) et avec les souches. Dans les élevages professionnels, la principale source d'infection est constituée par le portage sain chez le lapin lui-même. Les reproducteurs constituent les réservoirs constants de pasteurelles à l'intérieur même de l'élevage et entre les élevages via les opérations commerciales. La transmission aérienne ne joue pas de rôle majeur et les lapereaux se contaminent essentiellement au contact de leur mère à la fin de la période d'allaitement..

 

Un environnement défavorable est le plus souvent à l'origine des formes aiguës de la maladie

La maladie apparaît sous sa forme aiguë le plus souvent lorsque les facteurs environnementaux (taux d'ammoniac, vitesse de l'air) deviennent défavorables.. Les aliments granulés contenant trop de " fines " (particules mal agglomérées) vont jouer un rôle favorisant. La mauvaise hygiène de l'environnement immédiat du lapin (cages, abreuvoirs, trémies) ainsi que le surpeuplement sont des facteurs favorisants. Les sols (fonds de cages) sales perpétuent les mammites endémiques. La manipulation des reproductrices est très fréquente en élevage professionnel, en particulier, la palpation abdominale (diagnostic de gestation) faite en série dans la maternité représente un facteur de diffusion des mammites dans un élevage. Le risque est encore plus grand si cette palpation se fait au moment où la femelle se trouve être au pic de lactation donc au moment où la mamelle est très sollicitée (cas très fréquent dans les élevages conduits en bandes "à 42 jours").

 

Le taux de contamination s'accroit avec l'âge

L'âge est un facteur très important. La résistance "naturelle" des lapereaux avant le sevrage a été montrée. En effet, quant les conditions générales d'environnement sont bonnes, les lapereaux restent indemnes de pasteurelles jusqu'à l'âge de 21-25 jours, même si la mère est porteuse saine. Il ne s'agit pas seulement d'immunité passive transmise par le lait maternel puisque des essais d'inoculation expérimentale de lapereaux issus de mères SPF sont restés infructueux . Toutefois, la contamination naturelle de jeunes lapereaux sous la mère est possible dans les élevages où la pasteurellose sévit de façon endémique. Dans un élevage ne présentant aucun symptôme clinique, l'évolution du portage asymptomatique de P. multocida dans l'oreille moyenne: celui-ci est de 0% à 4 semaines, 3% à 8 semaines, 12% à 11 semaines, 18% à 14 semaines et 50% après les premières mises bas.

 

Extériorisation de la pasteurellose fréquente en fin de gestation.

La fin de la gestation est également une période d'extériorisation de la maladie chez les femelles. La fin de la gestation, comme chez tout mammifère, se traduit par de profondes modifications physiologiques et une plus grande fragilité due entre autres à une immunodépression de quelques jours. C'est dans les jours qui précèdent la mise bas que tous les phénomènes pathologiques préexistants vont s'extérioriser et notamment les affections respiratoires.
On isole des pasteurelles dans l'oreille moyenne des reproductrices dans plus de 60% des cas. Cette localisation asymptomatique joue un rôle majeur dans l'épidémiologie
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De très nombreuses souches de Pasteurelles, à pathogénicité variable

Pasteurella multocida est l'unique Pasteurelle trouvée chez le lapin. La bactériologie des pasteurelles, leur conservation et leur identification est difficile. De très nombreuses souches peuvent être caractérisées soit par leurs sérotypes capsulaires et somatiques (deux méthodes) soit par leurs caractères biochimiques soit enfin par leur pouvoir pathogène. Il y a peu, voire pas, de relation entre le sérotype et le pouvoir pathogène chez le lapin. Il existe des souches quasiment apathogènes qui se caractérisent par l'absence d'ornithine décarboxylase (ODC-) et une très petite taille des colonies. Toutes les souches porteuses d'ornithine décarboxylase (ODC+) sont pathogènes à des degrés divers.

 

Les entérites d'origine pasteurellique sont plus fréquente qu'on ne le croit

Les symptômes et lésions sont essentiellement une atteinte de l'arbre respiratoire et/ou des formes abcédatives de la peau, des mamelles, de l'oreille moyenne, de l'utérus, etc... Chez le lapin en engraissement, l'origine pasteurellique des entérites est rarement diagnostiquée mais plus fréquente qu'on ne le croit. Les formes septicémiques décrites en élevage fermier sont rares en élevage professionnel et semblent provenir de contamination par des souches aviaires (ODC+ et colonie de très grande taille).

 

Un diagnostic difficile, réalisable seulement en laboratoire

 

 

 

Des traitement souvent décevants

Théoriquement le diagnostic de pasteurellose est difficile sans l'aide du laboratoire car les formes respiratoires sont peu ou pas différentes de celles provoquées par d'autres germes et les formes abcèdatives peuvent être d'origine staphylococcique. En pratique et surtout en élevage professionnel l'origine pasteurellique de ces deux formes de pathologie est de loin la plus fréquente.
Les traitements antibiotiques sont très décevants car les rechutes sont quasi systématiques. En élevage professionnel ils ne doivent être conseillés que si de très rigoureuses mesures hygiénique et prophylactiques sont simultanément mises en œuvre. Celles ci concernent à la fois l'assainissement du cheptel reproducteur et l'assainissement du milieu.
La vaccination sera réservée aux reproducteurs et ne sera qu'un accompagnement des mesures de prophylaxie hygiénique. Seuls les autovaccins seront alors utilisés.

 
Une vitesse de l'air trop élevée dans les cages peut faire ressortir une pasteurellose latente
  
 
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