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INTRODUCTION |
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Le
rationnement quantitatif des lapins en engraissement est une méthode
largement pratiquée en France dans les élevages de production.
Par rapport à l'alimentation à volonté, la justification
de cette pratique est une réduction sensible de l'incidence
des troubles digestifs et en particulier celle de l'Entérite
Épizootique du Lapin (Gidenne et col., 2003). Par contre
les modalités précises de distribution de la ration
n'ont fait l'objet que de très rares expérimentations,
en particulier dans le cas des lapins élevés en groupe.
Si l'incidence du rationnement en lui-même sur la croissance
a fait l'objet de quelques études méthodologiques (Lebas
et Laplace, 1982; Szendrö et col., 1988, Perrier, 1998)
ces travaux ont systématiquement été conduit
sur des lapins logés en cages individuelles.
Dans le cas de lapins logés en groupe se pose la question de
la compétition potentielle entre lapins d'une même cage,
en particulier lorsqu'il n'y a pas de trouble sanitaire. En effet,
dans la majorité des élevages cette pratique d'alimentation
est mise en uvre de manière systématique et préventive
alors qu'aucun trouble n'apparaît. Une compétition à
la mangeoire serait susceptible d'entraîner une forte hétérogénéité
des lapins d'une cage, les plus forts consommant une partie de la
ration destinée aux plus faibles. La conséquence immédiate
d'une telle hétérogénéité de consommation
serait une plus forte variabilité des poids des lapins lors
de leur enlèvement en fin d'engraissement et un déclassement
d'une partie d'entre eux pour manque ou excès de poids.
Des travaux antérieurs avaient montré que la compétition
est négligeable pour des lapins alimentés à volonté
et qu'un seul poste de consommation était suffisant pour un
groupe de 6 à 10 lapins (Lebas, 1971; Rémois et col..,
1999). Qu'en est-il lorsque les lapins sont rationnés ?
Faut-il mettre une longueur de mangeoire plus importante à
la disposition des animaux pour permettre à chacun de consommer
la ration qui lui est destinée ? Par ailleurs, faut-il distribuer
la ration quotidienne en une seule fois, ce qui est le plus facile
mais risque de permettre à certains animaux de surconsommer
aux dépens des autres ? Ou bien faut-il distribuer cette ration
en plusieurs fois, ce qui complique la tâche mais peut accroître
les chances pour les plus faible d'accéder à la mangeoire
?
C'est pour tenter
de répondre à ces questions qu'ont été
mise en place trois expérimentations successives dans les
installations expérimentales du Centre INRA de Toulouse.
Globalement de 1 à 4 postes de consommation ont été
proposés à des lapins rationnés, logés
à raison de 6 ou 8 par cage et dont la ration quotidienne
a été distribué en une ou en deux fois dans
la journée. Les effets principaux ont été estimés
par le poids moyen des lapins en fin d'engraissement et par l'écart
type de ce poids intra-cage (estimation de l'homogénéité).
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MATÉRIEL
et MÉTHODES |
Les animaux, logement et conditions
générales.
Les 1768 lapins utilisés
ont été ceux disponibles dans l'unité de sélection
de la Station au moment de la mise en uvre de 3 essais. Les
cellules de maternité fournissant les lapereaux étaient
conduites en bande unique avec insémination tous les 42 jours.
Pour chaque essai, les lapereaux étaient tous contemporains.
Pour les essais 1 et 3, les lapereaux étaient issus de mères
INRA 1077 (lignée en sélection pour la reproduction
depuis plus de 30 générations) et de mâles de
type commercial à forte aptitude bouchère. Pour l'essai
2, les lapins appartenaient à la lignée INRA 1077
elle-même. Les animaux ont été placés
au sevrage (32-35 jours) dans des salles spécifiques d'engraissement,
à raison de 6 (essais 1 et 3) ou 8 (essai 2) par cage grillagée
de 0,36 m². Ils ont reçu un même aliment commercial
(16,5% de protéines, 15,5% de cellulose brute, et 3% de matières
grasses totales, 2550 kcal ED calculée). En outre, de manière
à éviter l'incidence de l'entérite épizootique
du lapin, les aliments étaient supplémentés
avec de la tiamuline et de la colistine. Les 3 essais ont été
réalisés entre mai et août 2005. Pour l'ensemble
des animaux de l'essai 2, un examen individuel a été
effectué en fin d'essai pour relever les cas de morsure,
de griffure et les traces de lutte en général.
Rationnement
Dans chaque essai, un lot de lapins alimentés à volonté
a servi à calculer le niveau de rationnement. La consommation
moyenne des lapins de ce lot a été mesurée
2 fois par semaine et a servi de base pour le calcul de la quantité
d'aliment à distribuer quotidiennement aux lapins rationnés.
De ce fait le rationnement réel n'a commencé que 3ème
jour de chaque essai et son niveau a été réajusté
2 fois par semaine. En fonction des lots expérimentaux, trois
types de trémies standard mobiles ont été utilisé.
Elles permettaient l'accès à un seul lapin (largeur
10 cm), ou l'accès simultané à 2 lapins (18cm
et 1 cloison médiane) ou 4 lapins (36cm et 3 cloisons).
Essai 1 :
analyse globale du mode de distribution de la ration
Au total 720 lapins ont été répartis équitablement
entre 12 lots (10 cages par lot) correspondant à la combinaison
factorielle 3 x 4 de trois nombres de postes de consommation par
cage : 1 - 2 ou 4 et de quatre niveaux d'alimentation (à
volonté [100%]- rationné à 80% avec distribution
1 fois par 24 h [80%]- rationné à 60% avec distribution
une fois par 24 h [60% 1R] - et rationné à 60% mais
distribution en 2 fois sur 24 heures 60% 2R]). Les lapins ont été
suivis de 35 à 73 jours d'âge.
Essai 2 :
précision de l'effet du nombre de distributions par jour
Un groupe de 608 lapins a été réparti en 4
lots homogènes tous rationnés à 85% (19 cages
de 8 par lot) correspondant à la combinaison factorielle
2 x 2 de 1 ou 2 postes de consommation et 1 ou 2 distribution d'aliment
par 24 h. En outre, 80 lapins contemporains servant de témoin
pour le niveau de rationnement (10 cages de 8) ont été
alimentés à volonté. Les animaux ont été
étudiés entre les âges de 44 et 79 jours. De
35 à 44 jours ils ont été tous alimentés
à volonté. En complément de ces observations
communes à tous, une contrôle de l'évolution
heure par heure de la consommation au cours des 8 heures suivant
la distribution de la ration (à 8h00), a été
effectué à 7 reprises, pour 6 cages par lot, en fin
d'engraissement entre les âges de 66 et 75 jours.
Essai 3 :
maximisation de la compétition à la mangeoire.
Les lapereaux d'un groupe de 360 individus ont été
individuellement classés selon leur poids au sevrage (35
jours) en "petit" - 550 à 750 g , "moyen"
- 751 à 900 g et "gros" - plus de 900 g. Ils ont
été ensuite placés à raison de 2 petits,
2 moyens et 2 gros lapereaux dans chacune des 60 cages elles-mêmes
équitablement réparties entre 3 lots expérimentaux
: A/ alimentation à volonté et 4 postes de
consommation, B/ restriction à 80% et 1 seul poste
de consommation et C/ restriction à 80% et 4 postes
de consommation. Le schéma expérimental était
donc du type 3 x 3 correspondant à 3 tailles de lapereaux
et 3 modalités d'alimentation. L'objectif de cette répartition
des lapereaux était de maximiser le risque de compétition
à la mangeoire. Les lapins ont été suivis de
36 à 71 jours d'âge.
Analyse
statistique.
Des données de chacun des essais ont été analysées
avec le logiciel SAS en incluant les effets factoriels avec interactions.
Pour l'essai 2 une analyse a aussi été faite en considérant
5 lots (les 4 du schéma factoriel + lots témoin alimenté
à volonté). Compte tenu de petits écarts dans
les poids vif moyens initiaux pour certains des lots, les analyses
ont été systématiquement faites aussi en incluant
le poids vif initial comme covariable et le cas échéant,
les moyennes fournies sont les moyennes ajustées pour un
même poids vif. Dans les différents tableaux de résultats,
les valeurs analogues affectées d'une lettre différentes
(a, b, c
) diffèrent significativement entre elles au
seuil P=0,05 .
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RÉSULTATS
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Les 3 essais
se sont déroulés dans des conditions sanitaires satisfaisantes.
La mortalité moyenne a été de 3,4% - 6,0% et
7,2% pour des essais 1, 2 et 3 dans l'ordre. Aucune
différence significative n'est apparue entre les différents
lots intra-essai.
Aucun signe évident de lutte à l'intérieur
des cages n'a été enregistré chez les lapins
observés au milieu des périodes expérimentales.
Dans l'essai 1, en fin d'expérimentation les lapins n'avaient
aucun signe de lutte dans 92,2% des cages rationnées. Les
7 cages ayant eu des bagarres se répartissaient sans relation
avec le type de rationnement ou le nombre de postes de consommation
disponible.
Les
cas observés à la fin de l'essai 2 ont été
plus nombreux (animaux volontairement en surdensité à
23,5/m² contre 17,6/m² dans l'essai 1) et répartis
de manière différente entre les différents
lots expérimentaux. Ils correspondaient aussi essentiellement
à des petites morsures ou griffures n'entraînant pas
de déclassement des animaux à l'abattoir. Par exemple,
la fréquence de mordillement ou de griffures la plus élevée
a été globalement observée dans les lots qui
disposaient de 2 postes de consommation par rapport à ceux
qui n'en avaient qu'un seul (17,8% des lapins touchés contre
10,0% - P=0,007). A l'inverse, aucun cas n'avait été
observé dans l'essai 1 pour les 30 cages de lapins disposant
de 2 postes de consommation. On peut donc en conclure que le mode
de rationnement ou le nombre de postes de consommation ne sont pas
sources particulières de conflit entre les lapins à
l'intérieur des cages. La surdensité, l'âge
des lapins et leur maturité sexuelle en fonction du poids
vif en fin d'engraissement sont des facteurs certainement plus importants
plus expliquer les bagarres dans les cages.
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Essai
1 (tableaux 1 et 2) |
Dans
cet essai factoriel 4 x 3 impliquant 4 modalités de distribution
des aliments et 3 niveaux pour le nombre de postes de consommation,
il n'y a eu aucune interaction significative entre les 2 types de
facteurs. Les effets simples sont donc présentés séparément.
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Tableau
1 :Incidence de la modalité de distribution de la ration
aux lapins dans l'essai 1 sur leurs performances de croissance -
Moyennes ajustées pour un même poids vif initial de
884 g à 35 jours
|
effet
du mode rationnement |
Paramètres
|
Rationnement
|
Coefficient
de variation résiduel
|
Probabilité
|
100%
|
80%
|
60%
1R
|
60%
2R
|
Poids final à 73 j.(g) |
2566 a
|
2425 b
|
2154 c
|
2153 c
|
3,4%
|
P < 0,001
|
GMQ (g/j) |
44,3 a
|
40,5 b
|
33,4 c
|
33,4 c
|
5,5%
|
P < 0,001
|
Indice de consommation |
3,05 a
|
2,64 b
|
2,39 c
|
2,40 c
|
5,9%
|
P < 0,001
|
écart-type intra-cage
(g) |
122 a
|
126 a
|
142 ab
|
157 b
|
33,0%
|
P = 0,025
|
|
|
Comme attendu,
le rationnement réduit significativement la vitesse de croissance
(tableau 1) mais moins que le niveau de restriction. Ceci entraîne
une amélioration sensible de l'indice de consommation. Le
rationnement à 80% ne modifie pas la variabilité des
poids intra cages. Par contre le rationnement à 60% tend
à l'accroître, en particulier lorsque la ration quotidienne
est distribuée en 2 fois. Enfin, chez les lapins rationnés
à 60%, le fait de distribuer 2 repas n'améliore aucune
des performances enregistrées par rapport à la distribution
d'un seul repas.
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Tableau
2. Incidence du nombre de postes de consommation sur les performances
de croissance des lapins de l'essai 1 - Moyennes
ajustées pour un même poids vif initial de 884 g à
35 jours
|
effet
du nombre de postes de consommation par cage |
Paramètres
|
Nombre
de postes
|
Coefficient
de variation résiduel
|
Probabilité
|
1
|
2
|
4
|
Poids final à 73 j.(g) |
2315 |
2340 |
2318
|
3,4% |
ns |
GMQ (g/j) |
37,7 |
38,3
|
37,7 |
5,5% |
ns |
Indice de consommation |
2,63 |
2,59
|
2,64 |
5,9% |
ns |
écart-type intra-cage
(g) |
142
|
133 |
136
|
33,0% |
ns |
|
|
Les performances
ont été en tous points similaires quelque soit le
nombre de postes de consommation proposé aux lapins. En particulier,
le fait de disposer de 4 postes de consommation pour les 6 lapins
de chaque cage, plutôt qu'un seul n'a pas entraîné
de réduction la variabilité des poids à l'intérieur
des cages.
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Essai
2 (tableaux 3) |
L'analyse
des résultats de cet essai a été faite d'une
part en utilisant les 5 lots expérimentaux (1 lots alimenté
à volonté et 4 lots rationnés à 85%) et
d'autre part en se limitant aux 4 lots de lapins rationnés,
répartis selon le plan factoriel 2 x 2 (1 ou 2 distribution
par jour et mise à disposition de 1 ou 2 postes de consommation).
Seuls les résultats de l'analyse selon 5 lots, la plus complète,
est fournie au tableau 3 |
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Tableau
3 : Incidence des 5 modalités expérimentales sur
les performances de croissance des lapins entre 44 et 79 jours.
- Moyennes ajustées pour un même poids
vif initial de 1070 g à 44 jours
|
factorielle
1 ou 2 repas/24h et 1 ou 2 postes de consommation + lot à volonté |
Critères
|
LOTS
|
Coef.
de Variation résiduel %
|
Probabilité
effet lot
|
Ad
libitum
|
1
repas
1 poste
|
1
repas
2 postes
|
2
repas
1 poste
|
2
repas
2 postes
|
Poids 79 j (g)
|
2083 a
|
2025 b
|
1979 c
|
1990 c
|
1991 c
|
1,7
|
P<0,001
|
GMQ 44-79 j
|
29,5 a
|
27,2 b
|
25,9 c
|
26,1 c
|
26,3 c
|
4,9
|
P<0,001
|
Indice de Conso.
|
3,30 a
|
2,95 c
|
3,11 b
|
3,11 b
|
3,04 bc
|
4,8
|
P<0,001
|
Écart type Pds79j g
|
120 a
|
119 a
|
90 b
|
96 b
|
100 ab
|
31,9
|
P=0,033
|
|
|
Le
rationnement à 85% de l'ad libitum a entraîné
une réduction significative de la vitesse de croissance des
lapins. Mais il faut souligner que cet effet est significativement
moins marqué pour les lapins ayant reçu leur ration
en une seule fois et ne disposant que d'un seul poste de consommation
(-8%) que pour les 3 autres lots rationnés (-12% en moyenne).
Cet effet se retrouve sur l'indice de consommation, significativement
amélioré par le rationnement comparativement à
l'alimentation à volonté, mais cette amélioration
est significativement plus marquée pour les lapins n'ayant
eu qu'une distribution par 24h et un seul poste de consommation.
Cette situation se traduit dans l'analyse de variance factorielle
par une absence d'effet moyen significatif pour le nombre de repas
ou le nombre de postes de consommation, vis-à-vis de la vitesse
de croissance ou de l'indice de consommation, mais avec présence
d'une interaction très hautement significative.
Enfin, il convient de souligner que dans aucune des situations le
rationnement n'a entraîné d'accroissement de la variabilité
du poids final intra-cage (8 lapins par cage) par rapport à
l'alimentation à volonté. Cette variabilité a
même été réduite pour les 3 lots ayant
eu la croissance la plus faible : interaction significative (P=0,033)
dans l'analyse selon le plan factoriel, en l'absence d'effet simple
des 2 facteurs contrôlés.
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rythme d'ingestion
Figure 1 :
Évolution de la consommation horaire au cours des 8 heures
suivant la distribution
|
L'évolution
de la consommation horaire de 30 cages a été suivie
en fin d'engraissement (entre 66 et 75 jours). Il s'avère
que le profil de consommation des lapins rationnés est totalement
différent de celui des lapins alimentés à volonté
(figure 1). Immédiatement après la distribution de
la ration les lapins rationnés consomment rapidement l'aliment
qui leur est distribué, lors que ceux qui sont alimentés
à volonté ont à peine consommé plus
de 20% de leur ingestion quotidienne à la fin de la période
de contrôle à 16h00.
Contrairement à ce que l'on pourrait attendre, les lapins
ne disposant que d'un seul poste de consommation pour huit mangent
leur ration plus rapidement que ceux qui disposent de deux postes:
la compétition incite à la consommation. Ainsi dans
l'heure qui suit la distribution, les lapins qui recevaient la totalité
de l'allocation quotidienne ont consommé 41,7% de la ration
s'ils disposaient d'un seul poste (lot 1R1P), alors qu'ils n'en
ont consommé que 33,5% s'ils avaient deux postes (lot 1R2P
; P<0,001). Chez les lapins qui ne recevaient que 50% de la ration
quotidienne à 8h00, les proportions équivalentes étaient
de 46,5% (lot 2R1P) et 38,0% de la ration quotidienne (lot 2R2P
; P<0,001). On peut même souligner que pour le lot 2R1P
dans un tiers des cas les lapins avaient consommé dans l'heure
qui a suivi la distribution, la totalité de l'aliment distribué
à 8h00, alors qu'aucun cas n'a été observé
pour le lot 2R2P. Le fait de distribuer 2 repas par jour incite
aussi les lapins à consommer plus rapidement la quantité
allouée à 8h00. Les écarts sont significatifs
(P<0,001) que les lapins disposent d'une seule ou de deux postes
de consommation.
Enfin il faut remarquer que les tendances observées au cours
de l'heure suivant la distribution se maintiennent au cours de l'ensemble
de la période de consommation. Ainsi dans le lot 1R1P, les
lapins ont pratiquement consommé toute leur ration dans les
5 heures suivant la distribution. Dans certain cas les lapins ont
même consommé toute leur ration dans les 3 heures suivant
la distribution. Par contre les lapins du lot 1R2P qui ont reçu
la même quantité d'aliment mais placée dans
une trémie à 2 postes "prennent plus leur temps"
et n'ont consommé que 89,2% de leur allocation 8 heures après
sa distribution (figure 2).
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|
Figure
2 : Évolution de la consommation cumulée des
lapins recevant un repas par jour et disposant de 1 seul ou de
2 postes de consommation - Moyennes et valeurs extrêmes
|
Essai
3 (tableau 4) |
Pour
cet essai qui avait l'effet de rationnement sur la compétition
intra-cage comme objet principal, la consommation et l'indice de consommation
n'ont pas fait l'objet d'analyse statistique. D'autre part comme les
interactions ne sont pas significatives entre l'effet du lot expérimental
et celui de la classe de poids des lapins intra-cage, seuls l'effet
moyen du mode de distribution de la ration est présenté
au tableau 4. Il est toutefois utile d'indiquer que la vitesse de
croissance entre 36 et 71 jours des lapins les plus petits (35,2 g/jour)
a été significativement plus faible (P<0,001) que
celle des lapins de poids moyen ou les plus lourds dont la vitesse
de croissance était pratiquement identique (37,9 et 38,0 g/j
respectivement) |
|
Tableau
4 :
Incidence du mode de distribution de la ration sur la croissance
et l'homogénéité des poids intra-cage -
Calcul sur la
base des valeurs individuelles des lapins vivants en fin d'essai
pour poids et gains de poids et des valeurs moyennes par cage pour
l'écart type du poids final intra-cage
|
|
Paramètres
|
Lots
|
Coefficient
de variation résiduel
|
Probabilité
|
|
|
|
Effectif
final |
112 |
109
|
113 |
- |
- |
Poids
à 36 j (g) |
834 |
829 |
830 |
6,9 |
ns |
Poids
à 71 j (g) |
2290
a |
2038
b |
2031
b |
7,1 |
P
< 0,0001 |
GMQ
36-71 g/jour |
41,6
a |
34,6
b |
34,3
b |
11,6 |
P
< 0,0001 |
Écart
type poids à 71 jours (g) |
228 |
234
|
239 |
34,1 |
ns |
|
|
Comme dans les
2 essais précédents, le rationnement des lapins a
réduit la croissance des lapins, sans modulation en fonction
du nombre de postes de consommation offerts aux animaux. En outre
l'homogénéité du poids des lapins est similaire
pour les 3 lots expérimentaux. Ceci implique que malgré
la forte hétérogénéité provoquée
par protocole, il n'y a pas eu de compétition plus marquée
pour l'accès à la mangeoire dans une cage de 6 lapins
où la ration quotidienne restreinte était accessible
via un unique poste de consommation, que dans une cage où
les 6 lapins étaient nourris à volonté et disposaient
de 4 postes de consommation.
|
DISCUSSION
Effets
du rationnement
|
Les expérimentations
rapportées par les auteurs retrouvent les effets classiques
de la restriction alimentaire : une certaine réduction de
la vitesse de croissance si la ration distribuée est inférieur
à 85-90% de l'alimentation à volonté, et une
amélioration de l'indice de consommation (Castello et col.,
1989; Arveux, 1991). Le présent travail précise en
plus qu'un rationnement de l'ordre de 80-85% n'a pas d'incidence
sur l'homogénéité des lots de lapins en croissance.
Même un rationnement drastique à 60% n'accroît
que fort peu la variabilité des poids finaux intra-cage.
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Effets
du nombre de postes de consommation |
Les résultats
des 3 expériences conduites montrent clairement qu'un nombre
élevé de poste de consommation par cage n'est pas
un facteur permettant de stimuler la valorisation de la ration ni
de réduire les effets de la compétition à la
mangeoire. Les auteurs retrouvent en cela les observations qui avaient
été faites chez le lapin nourri à volonté
(Lebas, 1971, Rémois et col., 1999).
Dans le cas de l'essai 2, chez les lapins recevant leur ration en
une seule fois, le fait de disposer de 2 postes de consommation
au lieu d'un seul a significativement altéré la vitesse
de croissance mais a amélioré l'homogénéité
des poids finaux. A la suite de ces 2 constatations relativement
contradictoires et pour mieux comprendre les effets de la compétition
intra-cage, l'essai 3 a été mis en place. Dans cet
essai, à niveau de restriction similaire (80-85%) le coefficient
de variation du poids vif a été 2 fois plus important
(CV de 11% à 12%) que dans les 2 autres essai (CV de 4,5
à 6%) où classiquement les responsables de l'élevage
ont eu tendance à placer dans chaque cage des lapins de poids
relativement homogènes. Cette situation était sensée
maximiser l'effet de compétition, les lapins les plus lourds
pouvant peser presque 2 fois plus que les plus petits, du moins
au début de l'engraissement. Malgré cela, le nombre
de postes de consommation (1 ou 4) n'a eu aucune incidence sur les
performances de croissance ou l'homogénéité.
Compte tenu de ces différentes observations, les méthodes
modernes de distribution automatique (Lebas, 2005) qui n'offrent
qu'une longueur limitée de mangeoire par cage (mangeoire
d'angle) sont adaptées aussi bien pour l'alimentation à
volonté que pour le rationnement.
|
Nombre
de distributions par 24 h |
Avec l'idée
de s'approcher du rythme de consommation des lapins alimentés
à volonté, différents fabricants de matériel
de distribution automatique proposent des dispositifs sophistiqués
permettant de fractionner la ration quotidienne en plusieurs fois
sur un cycle de 24 heures (Lebas, 2005). Les expériences
conduites ici montrent clairement qu'un tel fractionnement sur la
journée n'a pas d'intérêt et peut même
entraîner des contre-performances par rapport à une
distribution en une seule fois: réduction de la vitesse de
croissance , voire accroissement de l'hétérogénéité
des lots.
Par ailleurs l'étude du rythme d'ingestion de l'aliment a
montré qu'avec 2 repas par jour, les lapins mangent rapidement
les 2 fois et ont ensuite 2 périodes de jeûne de 10
heures environ par cycle de 24 heures. De leur côté,
les lapins ne recevant qu'un seul repas ont une période de
jeûne de 10 à 20 heures par cycle de 24 heures en fonction
du nombre postes de consommation disponibles. Ces différents
paramètres sont susceptibles de moduler l'efficacité
alimentaire : la valorisation d'un aliment est en effet d'autant
meilleure que le jeûne précédent a été
prolongé (essais généralement réalisés
sur des jeûne de plus longue durée). Les variations
de la durée de jeune observée dans l'essai 2 pourraient
expliquer l'amélioration relative des performances du lot
1R1P (vitesse de croissance et indice de consommation) par rapport
aux 3 autres lots rationnés. Il conviendra de mieux préciser
ce point et surtout de déterminer l'incidence de ces durées
variables de jeûne sur la sensibilité des lapins aux
troubles digestifs. Il est en effet utile de rappeler à la
fin de cet article que le rationnement a pour justification première
la réduction, chez les lapins en engraissement, des troubles
digestifs dus à l'EEL.
|
CONCLUSION |
En
conclusion, les auteurs suggèrent que si un éleveur
décide de rationner ses lapins en engraissement,
- cela
n'accroîtra pas la variabilité du poids final,
- qu'il
n'est pas nécessaire d'augmenter le nombre de postes de
consommation par rapport à ce qui existe dans les cages
pour l'alimentation à volonté
- et
enfin, qu'il ne faut pas fractionner la ration en plusieurs distributions
quotidiennes.
|
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Remerciements : Les auteurs tiennent à remercier
l'équipe cunicole de la Selap ainsi que les différents
stagiaires qui ont participé à la conduite de ces
essais, avec une mention toute particulière pour
Sandra Oliveras, Elodie Régis et Magalie Quintard.
|
Références
bibliographiques citées |
Arveux P. 1991. Le rationnement alimentaire quantitatif
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