CUNICULTURE
Magazine Volume 33 (année 2006) pages 92 à 96

Productivité des élevages cunicoles professionnels en 2005
Résultats de RENALAP et RENACEB

d'après
Annick AZARD et François LEBAS
Service Economie de l'ITAVI et Rédaction de Cuniculture Magazine

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  L'ITAVI centralise chaque année les résultats technico-économiques des éleveurs de lapins de chair en production organisée dans le cadre de deux programmes d'appui technique. Mis en place en 1983, RENALAP permet d'établir des références nationales sur les résultats des élevages en conduite individuelle, tandis que RENACEB, engagé en 1995, mesure l'évolution des performances des élevages en conduite en bandes. Les données 2005 ont été calculés en regroupant les résultats de 22 organisations de production, et portent sur environ 80% des élevages en production organisée. Les partenaires de l'ITAVI pour ce travail ont été la FENALAP, les Unions Régionales, différents groupements de producteurs et les Maîtres d'Oeuvre des GTE agréées. Le financement a été assuré par l'Office de l'Élevage et le Ministère de l'Agriculture et de la Pêche.  
  Pour les internautes de CUNICULTURE Magazine nous avons extrait un certain nombre de données de l'étude plus complète disponible sur le site Web de l'ITAVI www.itavi.asso.fr , sous forme de fichier *.pdf. Les commentaires présentés ci-après sont une combinaison de ceux issus de l'étude d'A. Azard de l'ITAVI et de ceux formulés au vu des résultats et des données antérieures par F. Lebas, rédacteur en chef de CUNICULTURE Magazine.  
     
 

Description de l'échantillon


Figure 1

 

Les références de RENACEB portent sur 1135 ateliers en conduite en bande (quasi exclusivement en insémination artificielle) et 9934 bandes complètes (-0,4% / 2004). Cela correspond à plus de 550 000 lapines reproductrices, en progression de 3,7% par rapport à 2004 en raison de l'accroissement de la taille moyenne des ateliers : 491 lapines contre 473 en 2004. Les références de RENALAP ont été établies sur un nombre beaucoup plus faible d'ateliers (44 en 2005 contre encore 64 en 2004) et correspondent aux performances d'environ 10 000 femelles en conduite individuelle et saillie naturelle. Les derniers ateliers travaillant encore en conduite individuelle sont de taille beaucoup plus modeste, 218 femelles en moyenne, et sont situés en région Aquitaine pour plus des trois quart d'entre eux..
Les ateliers avec conduite en bande sont situés principalement en région Pays de la Loire (46,1%). Avec les régions voisines de Bretagne (15,0%), Poitou-Charentes (13,7%) et Basse Normandie (3,9%) ce sont près de 80% des ateliers étudiés qui sont situés dans le Grand Ouest (fig. 1)

Globalement près de 1180 ateliers ont été suivis en GTE en 2005, regroupant 565 000 lapines, soit plus de 80% des ateliers en production organisée et environ 60% des ateliers travaillant en production rationnelle (plus de 20 mères lapines). Le nombre d'ateliers est un peu plus faible qu'en 2004, mais le nombre de lapines étudié est en légère progression (+1,6%).

 

 

Compte tenu d'une part du petit nombre d'ateliers qui travaillent en conduite individuelle (Renalap) et d'autre part de la forte réduction de ce nombre entre 2004 et 2005 ("perte" des ateliers disparus ou passés en conduite en bandes), les résultats moyens sont fournis à titre indicatif et sans commentaires spécifiques. Seuls les résultats de conduite en bande (Renaceb) font l'objet d'une analyse particulière dans cet synthèse.

 

Rythme de reproduction Parmi les ateliers conduits en bande (RENACEB), plus de 88 % le sont en bande unique, dont 25 % sont gérés selon la méthode "tout plein - tout vide" (2 cellules ou groupes de cellules utilisés en alternance en maternité puis en engraissement). La conduite en bandes à 42 jours est très nettement dominante et représente 96,7% des rythmes adoptés. Les autres cas correspondent à 31 ateliers en rythme à 49 jours et 2 ateliers à 35 jours, sur un total de 997. Par ailleurs, les 132 ateliers qui fonctionnent avec 2 ou 3 bandes utilisent aussi le rythme 42 jours.
   

Productivité moyenne des ateliers

 

 

 

 

Pour la très grande majorité des critères, l'année 2005 a vu des performances améliorées par rapport à celles de 2004 dans les ateliers en conduite en bande (RENACEB)

 

 

 

Les différences de poids à la vente et de prix de vente au kg vif entre les élevages conduits en bande (Renaceb) et ceux qui travaillent (encore) en conduite individuelle (Renalap), démontre que ces derniers travaillent dans un environnement économique différent des premiers.

Critères technico-économiques
RENACEB
conduite en bandes
RENALAP
conduite individuelle
2004 2005 2004 2005
- Nombre d'ateliers 1146 1131 64 44
- Nombre moyen de femelles en production 473 491 223 218
- Taux d'occupation des cages mères   % 130 134 132 132
- Taux annuel renouvellement des lapines   % 108 111 103 110
- Taux de mortalité annuel des femelles   % 28,0 29,2 40,1 45,1
- Taux de mise bas / IA ou /saillie   % 79,1 79,3 78,5 80,3
- Nb de lapereaux nés totaux / mise bas 10,01 10,10 8,79 8,82
- Taux de mortinatalité / nés totaux   % 5,8 5,8 7,6 8,8
- Taux lap.éliminés à la naissance / nés vivants   % 6,6 6,9 13,3 14,3
- Taux de mortalité au nid / laissés % 9,6 8,8
- Nb lapereaux sevrés par mise bas 7,96 8,10 7,04 6,87
- Taux de mortalité en engraissement % 9,4 9,2 11,7 11,3
- Taux mortalité naissance-vente /nés totaux   % 28,0 26,8 29,3 30,9
- Nb lapereaux produits par mise bas 7,21 7,37 6,22 6,13
- Nb lapins produits par femelle et par an 47,3 49,7 40,5 41,8
- Poids vif moyen à la vente    kg par tête 2,41 2,44 2,53 2,51
- Nb de kg produits par IA ou par saillie 13,75 13,98 12,35 12,20
- Age moyen à la vente lapins de chair (jours) 73,6 74,4 - -
- Prix moyen de vente au kg vif    €/kg 1,71 1,69 2,03 1,98
- Indice de consommation d'élevage 3,61 3,55 4,08 3,98
- Prix moyen aliment   €/kg 0,210 0,202 0,270 0,274
- MCA par femelle et par an   €/fem./an 108,4 119,6 96,0 92,8
- MCA par Insémination ou saillie €/IA 13,08 14,22 11,47 10,90
- MCA par kg de lapin produit  €/kg 0,95 0,98 0,94 0,89

MCA = Marge sur Coût Alimentaire (revenus de la vente des lapins moins dépenses d'alimentation)

Taille des élevages

Figure 2: Répartition de la taille moyenne des ateliers étudiés dans RENACEB

La taille moyenne de 491 lapines par atelier ne rend que partiellement compte de la situation réelle. En effet, près de 55% des ateliers ont une taille comprise entre 200 et 500 lapines. Par ailleurs, plus de 5% des élevages ont plus de 1000 lapines certains dépassant les 1500 ou les 2000 lapines par atelier. Il y a donc un majorité d'élevages de taille modeste correspondant au travail d'une seule personne à temps partiel ou plein temps, et quelques élevages de beaucoup plus grande taille nécessitant l'intervention régulière de plusieurs personnes.

La taille des élevages n'est pas, semble-t-il, en relation avec leur productivité. En effet, les 25% des élevages les plus productifs sur la base du poids de lapins produit par insémination, ont une taille pratiquement identique à celle du quart le moins productif.

 

Analyse de groupes en fonction de la productivité des ateliers en 2005


Figure 3: Distribution des ateliers suivis en 2005, en fonction du poids de lapins vifs produit par IA (kg / IA)

Ainsi, deux groupes d'ateliers ont été séparés, correspondant au quart supérieur et au quart inférieur des ateliers classés selon la productivité exprimée en kg de lapins vivants produits par IA (280 ateliers par groupe). Le quartile supérieur en a produit 16,54 kg alors que le quartile inférieur n'en a produit que 11,30 kg, soit en écart de 32%.

La plus forte productivité des ateliers du quartile supérieur semble liée en premier lieu à de meilleures performances de reproduction avec un écart de près de 10 points sur le taux de mise bas et plus d'un lapereau sur le nombre de lapereaux nés totaux par mise bas. Elle est également associée à une moindre mortalité des animaux: moins de pertes de femelles reproductrices, moins de lapereaux mort-nés, moins de mortalité au nid et surtout moins de mortalité en engraissement (5,7% contre 13,1% pour le quartile inférieur). Les presque 2 lapereaux d'écart par IA en faveur du quartile supérieur s'expliquent pour les deux tiers par les meilleures performances de reproduction et pour un tiers par les plus faibles mortalités.
La conséquence est un indice de consommation d'élevage toujours en faveur du quartile supérieur : seulement 3,41 kg d'aliment achetés par kg vif produit, contre 3,74 pour le quartile supérieur. Compte tenu d'écarts faibles entre les 2 groupes pour les prix d'achat des aliments ou celui auquel les lapins ont été vendus, les ateliers du quartile supérieur ont une Marge sur Coût Alimentaire par femelle et par an, de 47 € plus élevée que ceux du quartile inférieur (écart de 33%).

Au sein des élevages utilisant le rythme de reproduction à 42 jours, ceux qui fonctionnent en système tout plein-tout vide ont des performances améliorées par rapport à la moyenne : réduction de la mortalité des lapines (-2,1 points), de la mortalité en engraissement (-1,5 point), meilleure reproduction et meilleur indice de consommation. Au final, le poids vendu par IA est augmenté de 0,45 kg en tout plein-tout vide. La conséquence est une MCA par femelle moyenne présente qui atteint presque 130 € / femelle, contre 121 € pour la moyenne. Il faut cependant remarquer que ces 25% d'élevages appliquant la technique tout plein-tout vide ont généralement des installations plus récentes (créations ou transformations) ayant nécessité un plus grand investissement par lapine.

 

Performances réduites en bandes multiples

Les performances de reproduction sont plutôt plus faibles en bandes multiples qu'en bande unique avec un taux de mise bas inférieur à 79% et moins de 10 lapereaux nés totaux par mise bas. Pour les ateliers conduits avec 3 bandes, les taux de mortalité au nid et en engraissement sont en outre plus élevés, dépassant 12%. Le poids vendu par IA est ainsi de plus de 14 kg vifs en bandes uniques (rythmes 42 et 49 jours) alors qu'il n'est que de 13,6 kg pour les ateliers utilisant 2 bandes et de 12,8 kg pour 3 bandes (rythme 42 jours dans ces 2 derniers cas).
Finalement, malgré un prix de vente des lapins un peu supérieur en bandes multiples, l'avantage de la bande unique en terme de marge sur coût alimentaire est très net : 14,3 €/IA en bandes unique, 13,4 €/IA pour 2 bandes et 12,6 €/IA pour 3 bandes.
Il faut aussi noter que l'avantage des bandes unique à 49 jours, clair en terme de MCA par IA, ne se retrouve pas en MCA par femelle et par an : 121 €/femelle et /an en bande unique 42 jours et 104 €/femelle et /an en bande unique à 49 jours. Ainsi l'augmentation de la productivité par cycle ne compense pas la réduction du nombre de cycles possibles par an.

 

Performances plus élevées en système tout plein - tout vide Parmi les ateliers conduits en bande unique à 42 jours, ceux qui ont pu ou voulu adopter le système tout plein-tout vide ont une taille importante : 512 femelles. Par rapport à ceux qui gèrent des salles de maternité et d'engraissement affectées à une seule fonction, ils ont des performances améliorées : réduction de la mortalité de 2,1 points des femelles et de 1,5 points pour les lapins en engraissement, meilleur taux de mise bas et meilleur indice de consommation. Finalement le poids de lapins produits par IA est augmenté de 0,45 kg et la MCA de près de 1 €/IA en tout plein-tout vide. Ceci entraîne une MCA par femelle et par an atteignant près de 130 €/fem./an contre 120 € de moyenne pour l'ensemble des bandes uniques. Il faut toutefois souligner que ces élevages gérés en tout plein-tout vide sont tous des élevages récents ou rénovés récemment, avec un investissement plus élevé que la moyenne.

 

Evolution saisonnière des performances sur 4 années consécutives


Figure 4 : Variations mensuelles du taux de mise bas par IA au cours des années 2002 à 2005.


Figure 5 : Variations mensuelles du nombre de lapins produits par IA entre 2002 et 2005

Les résultats obtenus pour chaque bande au cours des années 2002 à 2005 ont été répartis en fonction des mois pour étudier les variations saisonnières.

On voit d'abord clairement apparaître les effets de la canicule de l'été 2003 : altération du taux de mise bas / IA pour les mises bas d'août et surtout septembre 2003 (figure 4). Les effets combinés sur la reproduction et sur les mortalités en maternité comme en engraissement ont entraîné la plus faible productivité par IA pour les enlèvements (fins de bandes) qui ont eu lieu en octobre et novembre 2003 (figure 5). Mais l'effet négatif des fortes chaleur de l'été 2003 a pu être constaté dès les enlèvements d'août et septembre 2003.

Globalement sur les 4 années on peut souligner les points suivants en fonction de la saison:

  • la fertilité est réduite à partir des mois de juillet - août et en hausse au cours du printemps.
  • la prolificité est en général maximale au printemps et minimale pour les mises bas d'août et septembre.
  • la mortinatalité est maximale au cours de l'été, mais il ne semble pas possible de distinguer de réelle saisonnalité de la mortalité en engraissement, en dehors du phénomène exceptionnel de l'été 2003 bien entendu.
  • le nombre de lapins produit par IA est maximum pour les enlèvements de juin-juillet (insémination de mars) et minimum vers octobre - novembre (inséminations du début de l'été en juin-juillet)
  • l'indice de consommation est le plus faible pour les fins de bande des mois d'été.
  • enfin le poids vif à la vente est plus faible au cours des mois d'été malgré un certain allongement de la durée d'engraissement. Ceci est la conséquence des chaleurs estivales qui réduisent sensiblement la vitesse de croissance et surtout la consommation des lapins (voir l'article de 2004 sur les températures tropicales).

Enfin, il faut souligner que si des variations saisonnières répétables existent bien pour certains critères, l'amplitude de ces variations reste relativement modeste comparativement à la variabilité existant entre ateliers de production.

 

Evolution des résultats de production de 1984 à 2005


Figure 6 : Evolution du taux de fécondité des lapines entre 1984 et 2005

Pour effectuer l'analyse de la productivité au cours des 22 dernières années (1984-2005), les résultats annuels des 2 GTE Renalap et Renaceb ont été combinés et pondérés par les effectifs de chaque GTE.

La taille moyenne des élevages en GTE a presque triplé entre 1984 et 2005 : accroissement de 169 à 480 lapines en production par élevage. Les performances techniques ont connu une progression rapide et assez régulière de 1984 à 1996 pour l'ensemble des critères. Pour certains d'entre eux comme le taux de fécondité (figure 6) ou l'indice de consommation d'élevage (figure 7), la progression a été peu perturbée par les accidents tels que l'épizootie d'EEL de 1997 ou la canicule de 2003.
Par contre les taux de mortinatalité ou de mortalité en engraissement (figure 8) ont été beaucoup plus affectés par les accidents comme ceux de 1997 ou 2003. En conséquence à partir de 1997 la progression des performances a nettement marqué le pas et a été marquéeune forte variabilitéde la productivité des élevages d'une année à l'autre. Cette variabilité se voit déjà à travers le nombre de lapins produits par mise bas effective (figure 9), mais prend toute son ampleur quant on considère le nombre de lapins produits par femelle et par an (figure 10). On peut estimer que les perturbations dues à la crise de l'EEL, suivies de celles liées à la canicule de 2003 sont tout juste terminées en 2005. En effet cette année les élevages en GTE ont presque retrouvé le niveau de productivité (lapins produits par femelle et par an) qu'ils avaient obtenu en 1996 : 49, 7 lapins produits par femelle dans les élevages en conduite en bande, contre 50 en moyenne en 1996.


Figure 7 : Evolution de l'indice de consommation d'élevage en 1984 et 2005

Figure 8: Evolution du taux de mortalité en engraissement entre 1984 et 2005

Figure 9 : Evolution du nombre de lapins produits par mise bas entre 1984 et 2005

Figure 10 : Evolution du nombre moyen de lapins produit par femelle et par an entre 1984 et 2005

Figure 11: Evolution de la Marge sur Coût Alimentaire de 1984 à 2005.
Le prix du lapin, comme celui de l'aliment (mesurés en € constants 2005) ont été divisé par deux entre 1984 et 2005. La marge sur coût alimentaire (figure 11) est sur une tendance genérale à la baisse sur le long terme (-0,45 € par femelle et par an), malgré la hausse régulière constatée depuis 2002 (progression de 18 € / femelle et par an entre 2002 et 2005). Les fortes variations de la MCA semblent dues à la fois à celles des performances techniques et à celles du prix de vente des lapins, ce dernier n'étant pas nécessairement en relation avec le prix de revient.
 
Conclusion
En 2005, les résultats technico-économiques des élevages de lapins en conduite en bande auront été marqués par une évolution plutôt satisfaisante de l'ensemble des critères technico-économiques. L'évolution est beaucoup plus mitigée pour les quelques élevages pratiquant encore une conduite individuelle. La conduite en bande en général, et plus précisément la bande unique combinée avec le système tout plein - tout vide semblent constituer des facteurs décisifs d'amélioration des performances technico-économiques des ateliers cunicoles.
   
   
 
 
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