CUNICULTURE
Magazine Volume 36 (année 2009) pages 95 à 110

Elevage cunicole et environnement
par
AUBERT C. , GREFFARD B., AMAND G. et PONCHANT P.

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  Première partie  
     
     
   
  3. L'utilisation de l'énergie en cuniculture  
 
    Les consommations d'énergie fossile impactent l'environnement de plusieurs façons, par la combustion qui produit du dioxyde de carbone (CO2) et donc des GES, mais aussi par l'utilisation des ressources qui sont maintenant limitées. En 2003, l'estimation de ces ressources sans tenir compte de l'évolution des consommations et des besoins figure dans le tableau 5.
Tableau 5 : État des lieux des réserves d'énergie fossile à l'échelle mondiale, exprimées en Gigatonne d'équivalent pétrole (Gtep)
Source : Livre blanc sur les énergies, 2003
 
Type d'énergie fossile
Réserves
prouvées
Consommation brute, depuis le début de l'ère pétrolière
Années de réserves (Estimation en 2003)
Pétrole
140 Gtep
120 Gtep
50 ans
Gaz
135 Gtep
55 Gtep
65 ans
Charbon
510 Gtep
-
260 ans
    En élevage cunicole, selon une enquête conduite par la Chambre Régionale d'Agriculture des Pays de la Loire en 2008, sur 31 élevages, la charge financière correspondant à la consommation d'énergie ne représente que 2,4 % des charges d'élevage (2,1 % pour l'électricité + 0,3 % pour le gaz).

En élevage de lapins, même s'il n'existe pas de besoins stricts de température ambiante, les recommandations habituelles sont de maintenir la température entre 18 °C et 28-30 °C maximum. Les besoins de chaleur les plus cruciaux en élevage cunicole se situent surtout au jeune âge, donc en maternité. Pour l'obtention d'un confort thermique en engraissement, à l'exception des périodes froides, la production de chaleur par les animaux est généralement suffisante, voire excédentaire en fin d'élevage.

Il s'agit de trouver l'optimum technico-économique entre l'apport de chauffage et la consommation d'aliment. Cette dernière est en effet elle aussi utilisatrice d'énergie et productrice de GES (sous forme indirecte) pour la production des matières premières, la transformation et le transport. Des essais récents ont été réalisés sur ce point par l'ITAVI en partenariat avec le CLIPP et les résultats sont en cours d'exploitation.
Afin de répondre à ces exigences, les bâtiments modernes sont équipés d'une ventilation dynamique, d'un système de chauffage et d'un système de refroidissement.

   

L'électricité est utilisée pour la ventilation mécanique, l'alimentation, le raclage, la régulation, l'éclairage… Tous les bâtiments ne sont pas équipés d'un système de chauffage : l'enquête précitée a montré que 31 % en étaient dépourvus. Lorsqu'un système de chauffage existait, la même enquête montre que dans 90 % il s'agit d'un chauffage au gaz et dans les 10 % restant d'un chauffage au fuel. La consommation de gaz moyenne pour un atelier ramenée à une taille de 650 IA par cycle est de 1 469 kg, mais avec des variations très importantes.

 

    L'élevage de lapin est donc un consommateur d'énergie fossile relativement modeste, contribuant relativement peu à l'émission de GES (l'électricité, principalement d'origine nucléaire n'est pas considérée comme contributive des GES). A titre de comparaison la production d'un poulet correspond à environ 3 kg d'équivalent CO2.

Pour réduire les consommations d'énergie fossile en élevage cunicole, il est souhaitable de procéder par étape comme dans les autres filières :

   
  • en économisant l'énergie (isolation des bâtiments, optimisation de la de la ventilation et du chauffage),
  • en récupérant l'énergie (échangeurs de chaleurs par exemple),
  • en utilisant les énergies renouvelables.
    Lorsque les locaux sont séparés, il serait intéressant d'utiliser la chaleur produite par les animaux d'engraissement pour chauffer le local de maternité.

Parallèlement il est possible d'économiser l'énergie en réchauffant l'air neuf entrant, c'est le cas par exemple du puits canadien ou des échangeurs-récupérateurs de chaleur sur l'air sortant. Ces techniques actuellement utilisées en production porcine et dans la filière avicole pourraient être utilisés en élevage cunicole. Elles peuvent permettre de réelles économies sur la consommation de gaz pour le chauffage des bâtiments d'élevage, mais, d'un autre côté, peuvent augmenter la facture d'électricité. Dans le cas du lapin, il n'est pas certain que cela engendre de réels gains financiers, mais peut néanmoins réduire l'émission de gaz à effet de serre.

4. Les déjections cunicoles
   

Le devenir naturel des déjections cunicoles est leur utilisation en agronomie. C'est pourquoi il est indispensable d'en avoir une bonne connaissance.

4.1 Quantification      des rejets au      niveau de      l'exploitation  

Les chambres d'agriculture de la Région Pays de la Loire en collaboration avec l'ITAVI (Greffard, 2007) ont réalisé une enquête en afin d'évaluer les quantités de déjections émises par un atelier cunicole selon le mode de gestion des déjections (solide ou liquide). Cette étude permet de disposer de références fiables sur les quantités de déjections produites en fonction du système de bâtiment. En effet, avant cette étude, il n'y avait peu de références en la matière. Cette étude réalisée avec les organisations de production dans des élevages conduits en insémination artificielle à 42 jours, a permis d'harmoniser les conseils en matière de gestion des ouvrages de stockages dans deux grandes catégories de bâtiment en matière de gestion des effluents, à savoir le système raclage journalier, et le système fosses profondes.

 

   

Système avec raclage journalier : dans un bâtiment en système raclage journalier, les crottes et les urines " tombent " sous les cages grillagées et sont évacuées quotidiennement vers une fosse située en bout de bâtiment. Dans un élevage équipé de ce système, la production de déjections est de 1,5 m3 de déjections par IA par an (calculé pour un nombre moyen d'IA réalisé par cycle de production à 42 jours) soit environ 28 litres par lapin produit.

 

   

Système sur fosse profonde : les déjections tombent également sous les cages, où elles restent entre 6 mois et un an en fonction de la hauteur de stockage disponible sous les cages. La quantité de déjections à gérer est alors de 0,75 m3 par IA et par an (13,9 litres par lapin produit), auquel il faut y ajouter 0,2 m3 par IA par an d'écoulement de jus de ces fosses profondes (3,7 litres par lapin produit). Avec ce type de gestion des déjections, on obtient sous les cages un produit plus ou moins sec mais qui est repris avec les systèmes classiquement utilisés pour la gestion des fumiers. Les jus d'écoulement sont quant à eux gérer comme des lisiers.

4.2. Quantification       des rejets au       niveau national  

Sur la base d'une consommation annuelle française de 456 000 tonnes d'aliment à 16,5 % de MAT et 0,6 % de phosphore (P), pour une production d'environ 128 000 tonnes de lapins vifs, l'excrétion d'azote est estimée à environ 8 350 tonnes par an, auxquels il faut retrancher la partie perdue par volatilisation (60 %) ; la quantité d'azote épandable est de 3 340 tonnes. Celle-ci correspondant à 19 650 ha sur la base de 170 kg de N/ha. Pour le phosphore, le rejet national est de l'ordre de 2 000 tonnes de phosphore P (4 580 tonnes de P2O5) par an, ce qui nécessite 45 800 ha d'épandage sur la base de 100 kg maximum de P2O5/ha. Comme on peut le constater, le calage d'un plan d'épandage sur le phosphore au lieu de l'azote multiplie les surfaces nécessaires par 2,3  , ce qui constitue une contrainte très forte dans les régions où l'élevage est très développé (cas de la Vendée par exemple).

 

4.3. Composition        des effluents  

Une bonne connaissance de la composition totale des effluents est nécessaire d'une part pour en faire un usage agronomique correct et d'autre part pour identifier les traitements possibles (tableau 6).

 

Tableau 6 : Composition des effluents d'élevage cunicole . Source : Chambre d'Agriculture de Vendée  
en % sur produit brut
Système lisier raclage
(n=31)
Système crottes fosse profonde (n=13)
Matière Sèche
9,58
26,67
rapport Carbone / Azote
10,97
13,62
Azote (N)
3,52
7,75
Phosphore (P2O5)
2,43
8,64
Potassium (K2O)
3,65
14,20
Calcium (CaO)
3,65
14,20
Magnésium (MgO)
1,28
3,99
   

En ce qui concerne les déjections de lapins, le classement des déjections s'effectuait selon leurs caractéristiques physiques : lisier type II, fumier type I (cf. paragraphe 1.6). Ainsi les déjections de type lisier étaient classées en type II alors que leur évolution suite à l'épandage s'avère être similaire à celle du fumier type bovin à quantité fertilisante équivalente, avec une libération mente de l'azote, même dans le cas des lisiers.
Cette particularité des déjections de lapin, a été démontrée par une étude menée par la Chambre d'Agriculture de la Vendée. Ce travail a montré que les lisiers de lapins présentaient dans 95 % des cas un rapport carbone sur azote supérieur à 8 ce qui permettait de les classer en déjections de type I (figure 2). De plus, diverses analyses de l'ISB (indice de stabilité biologique) ont permis d'établir que l'azote des lisiers de lapins est libérée plus lentement que celui contenu dans les déjections de volailles qui ont un rapport C/N supérieur à 8.

 

   
   

Depuis cette étude, les déjections de lapins, sous forme lisier ou fumier sont considérée de type I, sous réserve de justifier d'une analyse d'un rapport C/N supérieur à 8.
Ces résultats sont à rapprocher de ceux de Moral et al. (2005) pour qui la fraction facilement biodégradable des déjections de lapins (Cw), stockées pendant 1 mois, était de 1,24 % de la matière sèche, vs 0,78 pour les bovins et 2,16 pour les poulets.

4.4. Diminution        des rejets par        l'alimentation   Dans le mesure où le rejet est en général proportionnel à l'ingéré, il semble judicieux, si l'on veut réduire ces rejets, d'agir en amont, c'est-à-dire sur la composition de l'alimentation en réduisant les intrants.

Dans un article paru en 1999, Maertens insistait d'ailleurs sur ce point, en mentionnant le fait que, dans une expérience antérieure, en diminuant le taux de protéines de 17,1 à 15,7%, l'excrétion d'azote avait été réduite de 11%., sans atteinte des performances zootechniques. Une réduction de 38% avait été atteinte avec un aliment à 13,8 % de protéines, mais au prix d'une réduction du poids des lapins de 9%. Pour le phosphore, l'auteur estimait que la réduction du taux de phosphore dans l'aliment conduirait à des formules alimentaires trop onéreuses.

D'autres essais ont montré que l'utilisation d'aliments avec des teneurs réduites en protéines pouvaient réduire sensiblement les excrétions azotées chez le lapin à l'engraissement (Maertens et al., 1997). Toutefois la réduction du rapport protéines/énergie (P/E) se traduisait par un enrichissement des carcasses en lipides. L'influence du rapport P/E sur les performances, l'excrétion azotée et les caractéristiques de la viande des lapins en finition a été étudiée par Maertens et al. (1998). Ils ont pu montrer que les performances zootechniques n'étaient pas significativement influencées par la source énergétique, mais que l'ingestion réduite d'azote, pour les régimes à faibles taux P/E entraînait une réduction sensible de l'excrétion azotée (- 8,5%).

Masoero et al. (2008) ont comparé un régime pauvre en protéines (15,9% de MAT et supplémenté en acides aminés à un régime standard italien (19,7% de MAT) sur des lapins entre 31 et 84 jours, avec une série de contrôles entre 81 et 84 jours. Parmi les résultats obtenus, on notera une diminution de la concentration en urée de l'urine, sans modification de la qualité de la carcasse et de la viande. Les auteurs concluaient cependant à la nécessité de poursuive des essais.

   

Un essai a été réalisé sur 4 lots de lapins en engraissement afin de savoir s'il est possible de baisser les teneurs en protéine et en phosphore de l'aliment pour réduire les rejets dans l'environnement sans altérer les performances zootechniques des lapins (Renouf, 2008 - voir l'article dans Cuniculture Magazine). Une baisse de 10% de protéines brutes dans l'aliment (de 16% à 14,5%) entraîne le même niveau de baisse de l'azote dans les déjections (2,82% vs 3,14% avec le taux le plus élevé). Une baisse de 40% du taux de phosphore dans l'aliment (0,35% vs 0,6%) obtenue par 'incorporation de carbonate de calcium à la place de phosphate bicalcique, traduit par une diminution de 51% du taux de phosphore dans les déjections (0,45% vs 0,92% avec l'apport le plus élevé), sans altération de la la consommation alimentaire des lapins, de leur croissance ou de leur taux de viabilité. Pour l'auteur, l'intérêt sur le plan économique était minime.

 

    Eiben et al (2008) ont testé l'intérêt d'une réduction du phosphore et de l'utilisation de phytases (Aspergillus niger) sur des lapins entre 35 et 77 jours. L'essai a été réalisé en comparant 3 formulations : un témoin noté C avec un apport de 0,24% de phosphate monocalcique (MCP) et 0,58% de phosphore total, un essai noté P avec seulement 0,10% de MCP mais avec une supplémentation de 1000 FTU kg de phytase et 0,45% de phosphore total , et un essai noté p-MCP sans aucun apport de MCP mais avec 1000 FTU/kg de phytase et 0,35% de Phosphore total. Les résultats obtenus montrent que les régimes P et P-MPC n'ont pas eu d'impact significatif sur le poids des animaux.
Maertens et al .(2005) et Xicatto et al. (2005, 2007) proposent des éléments de calculs sur les rejets azotés (sans prise en compte des pertes par volatilisation) et/ou phosphorés, qui peuvent être comparés à ceux utilisés par le CORPEN (tableau 7). Malgré des différences sensibles au niveau des performances ou de la composition des aliments, les rejets d'azote par kg de poids vif diffèrent peu (66 à 68 g de N/kg PV) . Ce résultat est à rapprocher de celui obtenu par Calvet et al (2008) avec des lapins élevés jusqu'à un poids de 1,8 kg : l'excrétion azotée était de 40 g/kg PV avec une répartition sensiblement identique entre les fècés et l'urine ; par ailleurs, il considérait que l'excrétion d'azote correspondait à 58% de l'ingéré. Pour le phosphore, Maertens obtient un rejet supérieur de 10% à celui retenu par le CORPEN, mais avec un taux de phosphore dans l'aliment nettement plus élevé.

L'ensemble de ces résultats montre qu'il existe une bonne marge de progrès pour diminuer les rejets d'azote et de phosphore par la voie alimentaire.

Tableau 7 : Eléments de calcul pour l'estimation des rejets azotés et phosphorés  
Source    
CORPEN (1999)
Xiccato (2007)
Maertens (2005)
 - Nombre de lapins/femelle/an
49
42,8
45
 - Poids moyens des lapins vendus
2, 410 kg
2,650 kg
2,500 kg
 - N ingéré/femelle/an
11,940 kg
11,170 kg
-
 Composition de  l'aliment
 Protéines brutes
16,5 %
16,2 %
-
 Phosphore (P)
0,60 %
-
0,647 %
Rétention corporelle
 Azote (N)
28,8 g/kg de P.vif
31,0 g/kg de P.vif
29 g/kg de P.vif
 Phosphore (P)
0,58 g/kg de P.vif
-
0,50 g/kg de P.vif
Rejets d'azote (N)
 Par femelle et par an
8,092 kg
7,400 kg
7,420 kg
 Par lapin produit
0,165 kg
0,173 kg
0,165 kg
 Par kg de poids vif
0,068 kg
0,065 kg
0,066 kg
Rejets de phosphore (P2O5)
 Par femelle
4,440 kg
-
4,760 kg
 Par lapin produit
0,091 kg
-
0,106 kg
 Par kg de poids vif
0,038 kg
-
0,042 g

5. Le traitement des déjections de lapins

5.1. Le compostage
 


De nombreux éleveurs de lapins situés en ZES (zones d'excédents structurels : ces zones sont des cantons pour lesquels, compte tenu des animaux d'élevage présents aujourd'hui, les possibilités d'épandages pour une épuration par le sol et les cultures sont dépassées.) sont confrontés à un problème de gestion des déjections. Pour y remédier, l'exportation de ces déjections peut être une solution intéressante à condition que le produit exporté corresponde à une norme. Le compostage des déjections de lapins permet d'atteindre cet objectif, mais il n'est envisageable que pour la partie solide des déjections.

Le compostage se définit comme une biotransformation, aérobie (en présence d'oxygène) contrôlée, de matières organiques d'origine animale et/ou végétale, soit seules soit en mélange, produisant du gaz carbonique (CO2), de la chaleur, de l'eau dégagée sous forme de vapeur, et un substrat solide stabilisé composé de précurseurs humiques : le compost. Le compostage des déjections se traduit par :

   
  • une réorganisation de l'azote et de la matière organique,
  • une diminution de la teneur en carbone par transformation sous forme gazeuse,
  • une concentration en éléments stables (phosphore, oligo-éléments...),
  • une perte d'une fraction de l'azote sous forme ammoniacale (NH3) ou gazeuse (N2 l'azote de l'air)),
  • une montée en température jusqu'à 70°C, d'où un assainissement du produit au plan bactériologique..

Le compostage des déjections de lapins doit donc obligatoirement se faire après une séparation des phases liquide et solide. Les principaux avantages de la séparation de phase sont les suivants :

   
  • concentration des solides et des nutriments,
  • réduction des émissions d'odeurs et d'ammoniac par la soustraction de nutriments accessibles aux micro-organismes,
  • meilleure disponibilité des éléments fertilisants par la séparation des phases azotée et phosphorée,
  • épandage plus uniforme et réduction des dommages causés aux plantes par la réduction du nombre de passages au champ.
    La séparation de phase est souvent utilisée en tête de traitement, mais elle peut constituer un traitement à part entière. Différents procédés permettent de faire cette opération : centrifugation, tamis vibrant, vis presseuse, bandes…, mais ne sont pas appliqués dans la filière cunicole. Dans la pratique, d'autres systèmes sont utilisés en cuniculture: Deux d'entre eux ont été particulièrement étudiés car ils ont été mis en œuvre dans plusieurs élevages :
    le système PROLAP (brevet déposé - voir l'article qui lui est consacré dans Cuniculture Magazine) : les fonds de fosse au-dessus desquelles sont installées les cages d'élevage, ont une forme en W, permettant ainsi l'écoulement gravitaire des liquides vers une fente d'égouttage surplombant un caniveau. L'ensemble des liquides (eaux de lavage et urine) est ainsi canalisé vers une fosse de réception située à l'extérieur du bâtiment d'élevage. Les déjections solides sont, quant à elles, évacuées quotidiennement à l'aide d'un racleur. La présence d'une lame de décolletage verticale présente sur le racleur évite le comblement de la fente d'écoulement par des matières solides. La partie solide sort du bâtiment à un taux de matière sèche de l'ordre de 40%. Ces crottes, dont la structure est conservée, peuvent être reprises, stockées ou mises en andain pour être compostées, puis éventuellement exportées hors ZES.
   

le système SEPARLAP : les déjections de lapins sont raclées automatiquement une fois par jour et évacuées vers une plate-forme construite en contrebas en bout de bâtiment, bétonnée, en forme de V inversé (pente de 5 %) et couverte. Là, elles sont préséchées à l'aide des extracteurs de l'installation de conditionnement d'air des ateliers. Les jus excédentaires s'écoulent naturellement et sont acheminés vers une fosse fermée située sous la plateforme. Au bout de quelques jours, le taux de matière sèche atteint entre 30 et 40% et le produit peut être mis à composter.

 

    Le compostage de la partie solide des déjections de lapins obtenu selon le procédé PROLAP permet d'atteindre des températures élevées pendant plus de 15 jours à plus de 55°C. Avec ce système, le compost a évolué pendant 42 jours à plus de 55°C dont 38 jours supérieurs à 60°C garantissant ainsi une bonne hygiénisation du produit. Par ailleurs, le compost obtenu correspond aux spécificités de la norme amendement organique (NFU 44 051) en ce qui concerne les caractéristiques chimiques et biologiques et n'est donc plus assujetti à un plan d'épandage (Greffard, 2006)

Le système de compostage par aération forcée devrait pouvoir également permettre d'obtenir un compost normé, comme c'est le cas avec les fumiers de volailles.

Dans certains cas, le système de raclage des déjections comme en fosses profondes aboutit à un produit pâteux qui limite les fermentations aérobies et empêche le processus de compostage de débuter. Afin de remédier à ce problème, le mélange avec du fumier pailleux ou simplement de la paille, permet d'enclencher les fermentations aérobies essentielles à la montée en température et à la constitution d'un compost.

A noter aussi que Barrena et al. (2009) ont testé avec succès, à l'échelle du laboratoire, la possibilité de composter des viscères de lapins.

5.2. Autres       traitements   Dans les autres filières d'élevage, de nombreux systèmes de traitements sont proposés : beaucoup concernent le traitement des lisiers à faible teneur en matière sèche (traitement biologique, bassins filtrants, méthanisation…). Ces techniques sont difficilement applicables aux déjections de lapins, soit parce que celles-ci ont une teneur en matière sèche trop élevée, soit parce que les volumes à traiter sont insuffisants, soit encore parce que le coût de leur mise en œuvre est incompatible avec la viabilité économique des ateliers cunicoles. Cependant, il peut exister des cas où les déjections de lapins sont traitées avec d'autres produits. C'est le cas d'une installation de méthanisation par voie sèche, en fonctionnement depuis mi 2008, qui utilise du fumier de bovins, du fumier de volailles et des déjections de lapins.

D'une manière générale, le compostage des déjections cunicoles semble constituer la solution la mieux adaptée au produit.

6. La durabilité de la production cunicole
    L'agriculture durable ménage son environnement et sauvegarde à long terme ses capacités de production, en s'appuyant sur les trois piliers du développement durable : environnement, société et économie. Quand est-il de la durabilité des pratiques d'élevage du lapin de chair en France ?

Fortun-Lamothe (2007,2008) a commencé à faire un état des lieux des pratiques cunicoles. Les outils actuellement disponibles, dont la méthode IDEA, permettent de montrer que certaines des pratiques ou des orientations prises dans les élevages cunicoles, et d'une manière plus générale dans les élevages hors-sol, ne sont pas durables, sur le plan environnemental, pour les raisons suivantes : manque de lien au sol, difficulté de restitution des effluents sur les surfaces cultivées, dégradation de la qualité des eaux du fait de l'intensification de l'élevage dans certaines zones, utilisation d'énergie fossile pour maintenir les paramètres d'ambiance, coûts de transports élevés (et donc consommation d'énergie fossile) pour acheminer les aliments vers les élevages.

Des pistes de travail existent pour améliorer la situation : développement de techniques permettant de valoriser les effluents d'élevage à un coût écologique réduit, meilleure répartition des élevages sur le territoire, utilisation de l'énergie renouvelable, promotion des bâtiments à haute valeur environnementale, mais aussi poursuite de la progression sur l'indice de consommation.

Il est cependant nécessaire de réaliser un bilan environnemental global à l'échelle de la filière de production pour mieux estimer le rapport bénéfice/coût écologique et de développer un outil d'évaluation à l'échelle de l'atelier de production.

CONCLUSION
   

 

Au même titre que les autres élevages, l'élevage de lapins a un impact non négligeable sur l'environnement. La filière cunicole a cependant mesuré l'importance d'une meilleure prise en compte de l'environnement, afin de contribuer à améliorer l'image du produit " lapin ". De nombreuses solutions existent et commencent à être mises en œuvre dans les élevages, que ce soit pour diminuer et maîtriser les rejets, réduire les odeurs ou encore pour traiter les effluents. Si la filière souhaite que l'élevage cunicole devienne durable, outre la mise en œuvre de moyens techniques appropriés, il conviendra de rester très vigilants sur l'adaptabilité de ces techniques aux conditions de production, notamment sur le plan économique et social.

 
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